Asexualité et témoignage

Catégories : REEL FESSESTIVITES LGBT Travesti Gay Lesbienne Trans Sissy
Compte anonymisé
il y a 9 ans

Un sujet méconnu abordé sous la forme d'une interview. Un grand merci à Asex pour sa spontanéité.

...........................

TSM : Nous allons parler d'asexualité, pouvez-vous définir ce que c'est de façon rapide ?

Asex : Contrairement à l'abstinence qui est un choix, ici, il s'agit en quelques sorte d'une orientation complémentaire à celle d'être hétéro, homo, bi … On naît ou on ne naît pas asexuel, et ce n'est pas un problème psychologique.

Être asexuel, signifie que l'on a pas d'attirance et pas d'envie de faire l'amour au sens physique charnel. On a pas le besoin de pénétrer ou se faire pénétrer. Notre plaisir est totalement ailleurs.

TSM : On peut dire qu'il y a donc deux axes pour définir qui l'on est sexuellement ?

Asex : C'est ça, il y a l'axe du genre ou du non genre : hétéro, homo, bi, pan … Et l'axe du besoin : hypersexuel, sexuel, hyposexuel et nous le point zéro, les asexuels.

TSM : Tout les asexuels sont-ils semblables ?

Asex : Non. Il y a deux grands ensembles si je peux parler ainsi. Les romantiques dont je fais partie, ceux qui aiment et qui ont envie d'amour et les aromantiques qui eux n'ont pas ce besoin. Après, il y a ceux qui peuvent faire l'amour, ceux qui peuvent pas pour des raisons diverses, ceux qui se masturbent et ceux qui le font pas … Même en étant « classés » au point zéro, il y a un grand éventail de possibilité:)

TSM : Vous dites que vous n'avez pas besoin de faire l'amour, que vous ne l'envisagez même pas, et pourtant certains d'entre vous pratiquent la masturbation ?

Asex : Oui, ce n'est pas incompatible, on peut se masturber sur autre chose que la vision d'une pénétration.

TSM : Avez-vous une idée de combien de gens sont concernés ?

Asex : Un chiffre qui date un peu, dit que l'on est environ 1 % de la population.

TSM : C'est peu. J'imagine que vous avez des sites, des forums ?

Asex : Oui effectivement. Il y a le site Aven sur lequel vous pourrez retrouver beaucoup d'infos, des témoignages … http://www.asexuality.org/fr/

Il y a un ou même plusieurs sites spécialisés de rencontres, mais je n'ai jamais été m'en assurer.

Et l'on a aussi quelques symboles physiques pour ceux qui le veulent, comme un anneau noir au majeur, le triangle inversé qui va du blanc au noir et quelques autres plus confidentiels encore.

TSM : Pouvez-vous nous parler de votre histoire, nous faire une sorte de témoignage ? Et puis je réagirais si j'ai d'autres questions.

Asex : A l'âge où on commence à parler de sexe, de filles, de faire l'amour. A l'âge où on se vante d'avoir vu les films sur canal ou que l'on montre discrètement une image porno, j'ai toujours été à l'écart. Ces conversations et ce centre d'intérêt déjà ne me faisaient rien et je suis pas du genre à rester si je m'ennuie ou à faire semblant. J'ai donc appris à me forger une carapace bien solide, car pour le coup les moqueries ne cesseront jamais.

En parallèle j'ai mes premiers émois bdsm si je peux dire ainsi. J'étais tombé sur une vieille revue dans une grange. Et ça, ça me parlait. Et avec, le renforcement de l'idée que j'étais pas normal. Je commence seulement à assumer un peu. Malgré tout ça, au collège j'ai bien été amoureux une fois, mais ce n'était pas réciproque. Au lycée, les moqueries se calment un peu, il faut dire que j'avais la réputation de pas être facile si on me cherchait trop.

Arrive la vie active sans jamais avoir embrassé une fille en étant donc toujours puceau. Et dans la vie active, cela continue, cela parle de « cul » et je semble toujours à côté de mes pompes. Tant et si bien que vers la trentaine, quelque fois je jetais au milieu de la conversation que j'étais encore puceau, histoire de jeter un froid et réorienter les discussions.

C'est aussi vers cet âge que j'ai mis un nom sur ce que j'étais : ASEXUEL. Cela m'a facilité un peu la vie, je pouvais expliquer, me justifier comme si on pouvait pas nous laisser vivre tranquillement.

Un jour alors que j'y croyais plus, l'amour m'est retombé dessus. Elle connaissait mes difficultés mais m'aimant, elle a accepté d'essayer. Cela a duré trois mois, elle était soumise comme moi, et je n'arrivais pas être un dom assez convaincant pour elle, elle ne pouvait pas faire avec mon asexualité, on a fait plusieurs fois l'amour mais cela n'allait pas.

Et oui on en est capable en tant qu'asexuel de faire l'amour, inutile de préciser qu'il faut beaucoup d'amour pour que ça marche. D'après elle, je le faisais bien et durant l'acte, elle semblait être aux anges. De mon côté, j'essayais de faire au mieux, n'éprouvant rien, je me fiais à elle, à ses réactions.

Mais le fait que je n'y trouvais pas de plaisir, la frustrait énormément. Au point qu'on en était malheureux, très malheureux, tout les deux.

Elle ne se sentait pas assez désirée, pas assez femme et moi, j'avais mal de la rendre si malheureuse. Nous avons stoppé les frais. Depuis elle semble heureuse avec un autre et c'est tout le bien que je lui souhaite.

Et moi, c'est presque le retour case départ.

C'est donc à presque 34ans que je décide de franchir le pas et d'essayer de devenir moi. De devenir physiquement celui que je vois quand je ferme les yeux et que je m'écoute.

Car non content d'être hétéro, asexuel, soumis j'ai aussi un problème d'identité physique.

Voyez-vous, c'est que je ne me vois pas comme un homme ou comme une femme, mais comme un entre-deux, sans sexe aucun. En ce sens, je me sens assez proche sans être comme eux, des bispirituels des premières nations canadiennes ou des hijras en inde (vidéo intéressante : https://www.youtube.com/watch?v=k6oTQ-DflBc ).

J'avais toujours caché ça espérant naïvement que faire l'amour avec la personne que j'aimais me débloquerait et me ferait changer. Il n'en a rien été.

Du coup depuis quelques mois, j'essaie de changer. J'attends un RDV avec une équipe spécialisée à Lyon (prévu début Avril 2015). Mais la loi française étant ce qu'elle est, je sais dors et déjà que je vais probablement essuyer un refus. L'acte de retirer l'organe sexuel (verge et testicules) sans raison médicale est considéré comme mutilation en France et donc condamnable.

Je me prépare donc à devoir passer par d'autres moyens. On verra bien.

En attendant j'ai trouvé une pseudo béquille qui temporise un peu. C'est un médicament que l'on donne pour traiter le cancer de la prostate ou aux violeurs entre autre. Ça inhibe la testostérone. Il en résulte que le sexe finit par ne plus se manifester, on ne bande plus. L'excitation diminue.

Et vous pouvez pas imaginer le bonheur que c'est pour moi de ne plus sentir cet organe entre les jambes qui frotte, qui gonfle, qui bave. De ne plus avoir cette tension dans le bas ventre.

C'est une vraie libération en attendant d'être un jour, moi.

TSM : Cela est beaucoup plus clair pour moi, mais j'aurais des questions encore.

Vous même, vous masturbez-vous et qu'est-ce que ça vous fait ?

Asex : Effectivement et oui je me masturbe. Je vais illustrer ça en comparant à la faim.

Imaginez que vous avez faim toute la journée car j'ai ma tête qui digresse facilement, et que vous finissiez par céder. Alors vous mangez ce dont vous êtes capable, ce que vous avez sous la main, c'est pas terrible. Au final, vous n'aurez pas eu le plaisir d'un plat gastronomique mais vous aurez au moins eu la satisfaction de calmer votre ventre. Et bien, pour mon cas, c'est un peu pareil. Quand j'en ai marre, de cette tension dans le bas-ventre, je l'évacue. Ce n'est pas un réel plaisir, plus une nécessité pour ma part.

TSM : Et vous pensez à quoi dans ces moments ?

Asex : Pas à pénétrer une femme, ça c'est certain ^^

Souvent à des scènes très variées où je suis soumis à une femme, et quelques fois, à la tendresse d'une femme, à ses bras qui me tiennent, à son attention pour moi. Le fil conducteur étant l'abandon à une femme.

TSM : L'abandon ?

Asex : Dans l'abandon. Oui, dit comme ça, c'est curieux. Je n'ai trouvé satisfaction, que quand j'ai été en couple, s'abandonner à l'autre. En attendant, je rêve, je fantasme. Bon bien entendu, elle était soumise, et du coup je n'ai pas pu m'abandonner totalement. Mais c'était déjà très agréable.

Remettre sa vie entre les mains de quelqu'une, c'est ça mon plaisir.

Je le trouve également dans la tendresse, une main sur la joue, main dans la main, la tête sur l'épaule, se serrer dans les bras … Il est là mon bonheur, pas ailleurs et encore moins dans la culotte.

On pourrait comparer ça un peu à un amour de gamin pré pubère sans doute. A croire que je n'ai jamais passé la préadolescence.

TSM : Nos échanges sont cordiaux et agréables, mais en fait, auriez-vous envie de devenir un trans avec comme prétexte l’asexualité ?

Asex : Non, un(e) transexuelle est quelqu'un d'un sexe émotionnel et psychologique dans un corps de l'autre sexe. Pour ma part, je me sens comment dire en faisant simple ? Hybride ? Ni un, ni une, un mélange, une entre-deux. C'est loin d'être simple.

Pour illustrer, voici comment je me vois : de tout petits seins (bonnet A) que certains hommes ont naturellement d'ailleurs par le biais d'une gynécomastie, malheureusement je n'ai pas cette chance et sans présence entre les jambes. Et sans pour autant m'habiller 100 % femme ni me traiter en femme.

Et je ne sais même pas si c'est lié à mon asexualité.

Et tout ça en étant uniquement attiré par les femmes et je dirais même les femmes avec un pti quelque chose en plus : féminité, charme, sensualité, des femmes qui s'assument femmes et avec bon goût.

TSM : Très bien, une dernière question. Comment le vivez-vous ?

Asex : J'ai l'impression des fois, d'avoir que des mauvaises cartes en main. Sinon j'essaie d'avancer un pas après l'autre, mais c'est pas facile. Je me demande souvent s'il y a sur cette terre et en ce temps, une personne qui pourrait m'aimer tel que je suis et serais bientôt ?

Notes :

Bispirituel, ou « à deux esprits » sont des termes utilisés pour désigner des personnes qui, ne sont considérées ni comme des hommes ni comme des femmes. Ceci implique souvent un esprit masculin et un esprit féminin qui habitent le même corps. Essentiellement présent au Canada chez Les premières nations

Hijras, communauté regroupant les hermaphrodites, les eunuques, les transexuelles en Inde.

Pour finir :

Asex : Vous pourrez si ça vous intéresse, me suivre sur mon blog, qui me sert de journal de bord : http://hors-cases.over-blog.com/

Et merci à TSM pour m'avoir proposé de témoigner puis pour les échanges que nous avons eu pour la construction de ce témoignage.

Bien à vous

Asex

TSM : Nos échanges pendant lesquels nous avons « appelé un chat un chat » ont été cordiaux, d’une sincérité totale puis d’une grande transparence. Cette asexualité existe aussi chez certaines femmes qui, d’un homme n’attendent rien de sexuel. Elles sont en recherche d’Amour, de câlin et parfois de jeux coquins mais sans aucune pénétration. Gardez espoir, l’asexualité représente 1% de la population, internet peut aider à faire se rencontrer ces personnes.

Cette ressource n'a pas encore été commentée.
Publicité en cours de chargement